Le « Lean management » améliore-t-il les conditions de travail ?

Publié le 6 novembre 2012


Soutenu par l’ARACT [1], la CARSAT [2] et le Conseil régional, ce cycle de formation a permis à chacune des 5 entreprises participantes de travailler sur un problème précis identifié sur leur chaine de production et d’y apporter des pistes d’amélioration concrètes (voir encadré). Le 12 juin dernier, une restitution publique des résultats de cette formation-action a été organisée à l’Université d’Orléans et chaque entreprise a pu y témoigner des bénéfices qu’elle en a retirés mais aussi des questions restant en suspens.

Proscrire les mauvais gestes

« En participant au cycle « Lean & ergonomie », notre objectif était à la fois de réduire la pénibilité pour l’opérateur et d’améliorer la performance de nos productions de coques de siège » explique François Gernest, responsable méthode à « Eurostyle Systems », équipementier automobile basé à Châteauroux. Dès 2010, ce fabricant s’était déjà engagé dans une démarche de « lean manufacturing » visant à traquer les pertes de temps (quelques secondes) dans le traitement des pièces sur la chaîne de production. Mais il avait aussi parallèlement engagé un ergonome afin de « côter » chaque poste et d’identifier précisément les gestes à risques susceptibles d’altérer à plus ou moins long terme la santé du salarié.
« Pour réaliser ces cotations, nous filmons nos opérateurs » poursuit François Gernest. « Lorsqu’ils se voient sur la vidéo, ils se rendent compte plus facilement des mauvais gestes qu’ils exécutent et des progrès qu’il leur reste à faire ».
Au final, l’entreprise se dit satisfaite des résultats obtenus à l’issu de sa participation à « Lean et ergonomie ». Plus de 50 anomalies, causes de gaspillages sur la ligne de production mais aussi de pénibilité accrue pour les salariés, ont été relevées par les 4 autres entreprises participant à la formation. Cet état des lieux a permis l’élaboration d’un plan d’actions visant à éliminer ou réduire ces anomalies : raccourcir et attacher le câble du pistolet qui trainait au sol (risque de chutes), adapter la hauteur du chariot de stockage des pièces, installer des tapis et des semelles anti-fatigue, modifier la forme des porte-agrafes et les modes opératoires de certaines machines pour limiter la répétitivité des mouvements de poignets et du coude…

L’opérateur, au cœur de la démarche « Lean »

De manière générale, il apparait que la logique de rationalisation du « lean management » ne doit pas être appliquée de manière rigide en omettant de prendre en compte les contraintes propres à chaque entreprise. Des médecins du travail ont ainsi constaté [3] que « l’implantation du lean était plus aisée lorsque le dirigeant était lui-même en proximité des salariés et connaissait bien la réalité du travail ». En d’autres termes, le point de vue de l’opérateur quant à son activité au travail doit être valorisé et cela nécessite une animation concertée avec le management de proximité.
« Il faut impérativement s’appuyer sur le savoir faire et la connaissance de ceux qui produisent sur le terrain et créent de la valeur » renchérit Richard Kaminski, pilote de cette 1ère formation-action. »
Cette expérimentation du cycle « Lean & ergonomie » aura donc permis de prendre en compte le rôle des conditions de travail comme un facteur important de réussite d’une opération de lean management. Le niveau des gains de productivité obtenus dépend en effet en grande partie de l’amélioration de ces conditions de travail car, in fine, plus l’opérateur a le sentiment que la pénibilité des tâches à accomplir a diminué, plus il a tendance à renforcer son implication à son poste de travail.

Les « Gemba Walk » : une méthodologie participative
Les « Gemba walk », terminologie spécifique à la méthode Lean, doivent permettre aux entreprises participant à une formation-action (ou à un groupe de travail) d’être à la fois observateur et acteur. Concrètement, la « Gemba Walk Lean et ergonomie » a permis aux
2 collaborateurs représentant chaque entreprise participante (un acteur « production/méthode » et un acteur « santé/ergonomie ») de se rendre 2 fois de suite dans chacune des 4 autres entreprises.
Une première fois pour observer de visu l’atelier de production de l’entreprise visitée et identifier des anomalies. Cette séance de terrain est suivie d’un travail en groupe d’analyse et de propositions d’amélioration effectuées par les participants.
Une deuxième fois pour évaluer quelques mois plus tard l’impact de la mise en œuvre des pistes d’amélioration préconisées.

En savoir plus :

La synthèse des 4 témoignages d’entreprises est consultable sur le site :
http://lean.proforum.fr
Rubrique : Les actions régionales
> Les gemba walk > Gemba walk ergo

Notes

[1Association Régionale pour l’Amélioration des Conditions de Travail

[2Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail

[3Programme et actes du colloque « Evolution des modes de management, quelle place pour la santé ? Exemple du lean » organisé le 22 mai 2012 par la Société de médecine et de santé au travail de Strasbourg (SMSTS) consultable sur le site : http://www.smsts.fr/newsite

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