Accompagner les salariés lors de la numérisation de leurs outils de travail
Publié le 18 juin 2019 | Dernière mise à jour le 10 octobre 2022
Le 24 mai dernier, les 4 entreprises FARE [1] ayant bénéficié durant près de 2 ans de l’appui de l’AFNOR ont dressé un premier bilan devant la presse et quelques acteurs institutionnels à Saint-Jean de Braye (45). « Les effets du numérique posent de nombreuses questions sur la qualité des emplois futurs » déclare d’emblée Stéphane Thomas, chargé du service « mutations économiques » à la Direccte. « Cette expérimentation a mis en exergue la réelle plus-value d’une approche alliant formation collective, appui sur site auprès des équipes et réunions de partage de bonnes pratiques ».
Des craintes pour la plupart infondées
« Au total, je serai intervenu lors de 44 demi-journées auprès des entreprises » précise Jacques Roux, consultant en prévention des risques professionnels, mandaté par l’AFNOR pour cette action. « Au départ, nous avons pris le temps d’interviewer chaque collaborateur concerné en lui demandant de nous expliquer ce qu’il vit au quotidien au sein de son atelier et ce qu’il imagine pour demain avec la numérisation. Les craintes exprimées, souvent infondées, ont été restituées de manière anonyme à l’ensemble du personnel. Certains avaient peur de perdre la flexibilité de leurs horaires ou de se retrouver en équipe postée. D’autres appréhendaient une charge mentale plus forte ou une traçabilité accrue qui n’auraient pas toléré le droit à l’erreur ». Cet état des lieux a permis de dresser pour chaque entreprise une série de freins et leviers inhérents à l’introduction du numérique et d’élaborer des plans d’actions sur mesure pour lever les blocages et faire de ce changement technologique une opportunité pour l’essor de l’entreprise et l’épanouissement des salariés.
Montée en compétences des opérateurs
Chez FARE, société loiretaine (Dadonville - 50 salariés), leader dans la détection d’incendie, l’enjeu était de mettre en place une ligne robotisée pour une nouvelle gamme de détecteur. « Jusqu’alors tout était produit à la main » remarque Ludovic Villain, chef de projet de cette ligne modernisée. « J’ai demandé aux opérateurs de valider avec moi le choix de chaque robot et de chaque poste informatique. Fin juin, ils suivront une formation pratique sur la chaîne et verront bien que les robots, loin de prendre leur boulot, vont les amener à monter en compétences et à gagner en confort. En effet, toutes les phases de montage à faible valeur ajoutée, comme clipser des blocs plastiques, seront automatisées. Seules certaines soudures délicates resteront manuelles ».
Seul bémol à cette transformation mis en avant par certains salariés : la perte des horaires libres et le passage à une grille imposée. Mais cela ne devrait pas créer trop de frustrations car « la prise de poste sur la nouvelle ligne se fera sur la base du volontariat » note Ludovic Villain.
Une formation en intra pour les salariés en difficulté
Autre cas de figure chez AFL(Courtenay, 45 – 15 salariés), spécialisée dans la fabrication de barrière de crash-test en aluminium nid d’abeille pour l’industrie automobile. « Les plaques d’aluminium se ressemblent beaucoup et il y avait des risques d’erreur » constate Patrick Poisson, PDG d’AFL Group. « Nous avons donc décidé d’informatiser tous nos procédés de fabrication afin de garantir leur traçabilité et d’accroître, in fine, la satisfaction de nos clients. Notre personnel a bien adhéré à la démarche. Ils y ont vu la preuve que la direction se souciait des questions de bien-être au travail. Mais, pour 2,3 salariés qui n’avaient aucune pratique numérique, le passage risque d’être difficile. J’envisage donc de monter une formation adaptée en intra dans nos locaux ».
Sensibiliser les entreprises aux bonnes pratiques
Au final, cette action collective aura permis à 4 entreprises de sécuriser leurs transitions numériques en positionnant leurs équipes d’opérateurs au cœur de la réussite de leurs projets. « L’organisation du travail, la place de l’humain dans le processus de robotisation, la nécessaire montée en compétences… sont autant de préoccupations sur lesquelles il fallait écouter, rassurer, planifier, voire investir pour optimiser cette transformation numérique » constate Anne Youf, Déléguée régionale Centre-Val de Loire du groupe AFNOR. « Sur toutes ces questions, nous avons pu mobiliser nos compétences en termes de prévention et de management de projet ».
Conformément à l’ambition initiale fixée par la Direccte, il convient à présent de tirer tous les enseignements de cet accompagnement et de sensibiliser les entreprises ayant des projets numériques aux bonnes pratiques à adopter et aux écueils à éviter en matière d’appui RH auprès de leur personnel.
Notes
[1] (Dadonville - 45) ; SEFI (Dadonville - 45) ; AFL (Courtenay - 45) ; Avignon Ceramic (Bruère-Allichamps - 18)