« Les TPE-PME industrielles n’anticipent pas assez la transition numérique en cours »

Publié le 25 avril 2018

En septembre 2017, plus de 1000 entreprises industrielles (de 1 à 249 salariés) de la région ont répondu à une enquête téléphonique initiée par la Direccte en partenariat avec les principaux acteurs institutionnels économiques régionaux [1]. Retour avec Marion Hillau, chef du service "études-statistiques" de la Direccte sur les principaux enseignements de cette étude.

L’objectif assigné à cette enquête était de mieux appréhender le niveau d’intégration du numériques dans le TPE-PME industrielles et son impact sur les outils de production, l’organisation du travail, la relation client…
Marion Hillau, qui a piloté au titre de la Direccte la réalisation de cette enquête nous donne sa lecture des résultats saillants.

Selon les conclusions de votre étude, il semble que les entreprises, pour leur grande part, ne se soient pas encore vraiment mobilisées pour prendre au bond la révolution numérique en cours et en saisir toutes ses opportunités de développement ?

Oui, la prise de conscience des dirigeants reste relativement faible quant à la nécessité d’un passage volontaire et réfléchi aux technologies numériques comme moteur de différenciation et de croissance. Beaucoup semblent subir une transformation qui s’impose à eux sans avoir défini de stratégie d’anticipation face à cette révolution technologique. Ceux qui font cet effort en tire pourtant de réels profits. Ainsi 96 % des établissements ayant choisi d’intégrer des machines à commande numérique reconnaissent avoir enregistré des gains de productivité.
Il est vrai que l’effet de taille de l’entreprise est discriminant à cet égard. Songez que plus de la moitié des dirigeants de TPE (moins de 10 salariés) nous disent devoir gérer seuls leurs outils informatiques faute de moyen alors que 40 % des entreprises entre 10 et 49 salariés ont les moyens de recourir à un prestataire externe. Quant aux entreprises de plus grandes tailles (entre 50 et 249 salariés), ¾ d’entre elles nous disent pouvoir s’appuyer sur un service informatique ou des salariés dédiés en interne.

Les dépenses de formation et les projets d’investissements liés au numérique semblent encore faibles par rapport aux enjeux ?

Oui, cela est préoccupant et conforte l’appui des pouvoirs publics dans ce domaine à destination des entreprises. Au cours des 5 dernières années, seulement la moitié des établissements a proposé des formations numériques à ses salariés ; Or celles-ci concernaient avant tout des outils bureautiques (44%) et des logiciels « métiers » (40%). En fait seules 32 entreprises envisagent de recruter des profils spécifiques aux métiers numériques comme des programmeurs ou des codeurs.
S’agissant des investissements numériques, seule une entreprise sur quatre nous a fait part de projets dans ce domaine. A cet égard les secteurs de l’imprimerie-édition et des équipements médicaux se démarquent puisque 40% de leur TPE-PME expriment leur volonté de réaliser des investissements dédiés.


Le 25 mai prochain sera la date d’entrée en vigueur du Règlement général de protection des données (RGPD) qui est le nouveau cadre européen règlementant le traitement et la circulation de toutes les données numériques à caractère personnel. Les entreprises interrogées sont-elles sensibilisées à l’importance de la protection de ces données ?

A l’évidence non. Il semble même y avoir un réel manque de compréhension de la notion même de données dites « sensibles ». Seulement ¼ des TPE-PME affirment en effet avoir identifié des données sensibles au sein de leur établissement. Pourtant, ¾ d’entre elles déclarent avoir mis en place un dispositif spécifique à la sécurisation de leurs données. Mais s’agit-il de l’activation d’un simple anti-virus ou au contraire de l’instauration de véritables procédures de protection (sauvegarde physique ou dans le cloud, contrôle d’accès…) ? Les résultats de l’enquête ne permettent pas de le dire. Une nouvelle enquête sur ce sujet serait sans doute à l’avenir opportune.

Propos recueillis par Pierre DUSSIN

Notes

[1Conseil régional, CRMA, Pôle emploi, Dev’Up, Aract et GIP Recia